Parville, Le Bois de Parville, Eure. Droits de doubles sesterces frappées à l’effigie de l’empereur Postume. À gauche : monnaie d’imitation vers 266-268. À droite : monnaie officielle émise à Trèves en 261. (© Photo H. Paitier, Inrap, 2006)
Dans le cadre des travaux d'aménagement du contournement d'Évreux, une équipe de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) a étudié, sur prescription du service régional de l’archéologie (Drac Haute-Normandie), jusqu'en juillet 2006, sur la commune de Parville, un vaste site du second âge du Fer et de l'époque gallo-romaine, occupé du Ier siècle avant notre ère au IVe siècle, à faible distance de la ville antique d'Évreux.
Une ferme gauloise
La fouille archéologique a permis d’identifier une importante « ferme indigène » gauloise qui comprend, au sein d’un vaste enclos, des bâtiments domestiques et agricoles et un espace agraire aux alentours. Les limites de l’enclos sont matérialisées par un fossé de dimensions remarquables (360 m de périmètre, 3 m de large et 2 m de profondeur). Un talus en terre longeait ce dernier à l’intérieur de la parcelle. Signe ostentoire de propriété, l’aménagement de cet imposant fossé-talus témoigne d’un travail collectif et d’une main d’œuvre abondante et plaide pour une demure de rang hiérarchique élevé. La présence de monnaies d’or et d’argent originaires de cités gauloises lointaines corrobore cette hypothèse.
De plan rectangulaire ou carré, les édifices gaulois sont construits en bois et en terre. Leur étude architecturale repose essentiellement sur l’analyse des « trous de poteau » qui soutenaient les murs et la toiture.
Parville, Le Bois de Parville, Eure. Vue aérienne du site archéologique. (© Photo H. Paitier, Inrap, 2006)
L’agriculture constitue apparemment l’activité principale de cet établissement. La fouille a notamment permis de mettre en évidence les différents vestiges liés au stockage des denrées agricoles, comme des silos souterrains, des greniers surélevés et des amphores.
Parmi les activités artisanales, la métallurgie tient une place particulière, dans la mesure où de nombreux déchets témoignent du travail du fer.
Associée à cet établissement une nécropole à incinérations est située à une dizaine de mètres au sud-est de l’enclos.
Une domus romaine
Marquant une rupture avec l’architecture gauloise, les édifices gallo-romains datés des Ier au IVe siècles de notre ère se composent de plusieurs bâtiments reposant sur des fondations en silex et moellons calcaires liées au mortier. Ils font partie d’un important établissement rural situé en périphérie de l’antique Mediolanum Aulercorum (Évreux).
La fouille porte notamment sur un bâtiment rectangulaire de type domus, installé sur le fossé gaulois. Il a livré de nombreux objets de la vie quotidienne (épingle en os, anneau en bronze, tesselles de mosaïque…), ainsi qu’une balance en bronze en parfait état de conservation.
Parville, Le Bois de Parville, Eure. Balance romaine en bronze composée de deux crochets, sur lesquels on suspend l’objet à peser, et un contrepoids fixé le long d’un fléau gradué. (© Photo H. Paitier, Inrap, 2006)
Parville, Le Bois de Parville, Eure. Revers de doubles sesterces de l’empereur Postume, représentant une galère allant à gauche. À gauche : monnaie d’imitation émise vers 266-268. À droite : monnaie officielle émise à Trèves en 261. (© Photo H. Paitier, Inrap, 2006)
Un dépôt de faux sesterces
Au début des années 270 de notre ère, un dépôt monétaire est enfoui par les habitants de Parville. Ce petit pécule de 100 monnaies de bronze constitue alors une réserve de métal de qualité. Un cinquième de cet ensemble se compose de sesterces usés appartenant au Haut-Empire (Néron, Marc Aurèle, Commode…). Le reste consiste en doubles sesterces à l’effigie radiée de Postume (260-269 de notre ère). Le revers évoque généralement une victoire navale de l’empereur gaulois sur les pirates francs. Si une dizaine de monnaies provient de l’atelier officiel de Trêves, la plupart sont des contrefaçons issues d’une officine clandestine, qui pourrait être celle de Châteaubleau (Seine-et-Marne) récemment découverte. Ces imitations frappées ou coulées sont de qualités inégales.
Après 250 de notre ère, la Gaule est une contrée très monétarisée où le numéraire officiel ne peut subvenir aux besoins. La politique monétaire de Postume imposant un double sesterce à peine plus lourd que l’ancien sesterce, se révèle un échec qui entraîne le développement d’un faux monnayage semi-clandestin en Gaule.
Aménagement : Direction départementale de l’équipement de l’Eure. ; Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Haute-Normandie) ; Recherche archéologique : Inrap Responsable scientifique : Dagmar Lukas, Inrap.
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