Abbaye aux Hommes de Caen (XIe à XIIIe siècles). (Photo Rodolphe Corbin © Patrimoine Normand)
Le chœur de l’Abbaye aux Hommes, et le tombeau (récent) de Guillaume le Conquérant. La sépulture d’origine a été pillée par les protestants en mai 1562. (Photo Thierry Georges Leprévost © Patrimoine Normand) |
Le duc est mort !… Dans l’abbaye, la nouvelle se répand en quelques instants : le duc est mort ! Le duc est mort !… On s’y attendait depuis trois semaines, mais, paradoxalement, quand l’événement survient, on refuse tout d’abord d’y croire. Le duc est mort ? Mais hier encore, il parlait normalement à ses proches, il les conseillait comme aux plus beaux jours de son âge ! Et ce matin, plus rien ? Le duc est mort… Après quatre décennies d’un pouvoir absolu, Guillaume le Conquérant a quitté la vie terrestre. Pourtant, il paraissait indestructible.
Tandis que les prêtres s’affairent autour du cadavre en psalmodiant leurs prières, l’étonnement lié à la disparition du duc-roi plonge son entourage dans la consternation. Voilà des années que ceux de sa cour et de sa mesnie se reposaient sur lui, qu’ils attendaient son bon vouloir pour agir, qu’ils vivaient à travers ses désirs, ses pulsions, sa générosité sélective. Et maintenant ? Que va-t-il advenir d’eux, à présent que leur phare s’est éteint ?
Le dernier voyage
Cependant, il faut agir, respecter ses dernières volontés, avertir qui de droit. Sur-le-champ, un courrier se met en route pour la France, afin d’informer Robert Courteheuse qu’il est devenu – enfin ! se dira-t-il sans doute – le nouveau duc de Normandie, un titre qui paraît bien lourd sur les épaules de l’inconséquent aîné de Guillaume et de Mahaut. Quant au roi d’Angleterre désigné quelques jours avant l’issue fatale, Guillaume le Roux apprend le décès de son père au port de Wissant, alors qu’il allait traverser le Chenal pour rejoindre Douvres. Raison de plus pour s’embarquer dare-dare et se faire couronner avant qu’un nouveau complot saxon ne se fasse jour !
La triste nouvelle mettra beaucoup plus longtemps à parvenir en Italie du sud, où se trouve la mission orientale envoyée par Guillaume pour ramener de Nicée la sépulture de son père, sur le chemin de son cher duché ; en apprenant que le fils de celui qu’ils escortent est mort lui aussi, les ambassadeurs abandonnent leur funèbre chargement, et c’est là, sur une route de Calabre, que Robert le Magnifique achève son voyage de retour ; c’est là que ses restes sont perdus à tout jamais, sur cette péninsule colonisée par les Normands de Tancrède de Hauteville, pas tout à fait en terre étrangère…
Partout, règne l’agitation fébrile propre aux grands changements. On connaît bien ici et là quelques mou...
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