Les vestiges de la « Tour perdue » découverts en 2015. Ses 18,00 m de diamètre minimum en font l'une des plus imposantes de la France médiévale (© Érik Follain).
Lors de travaux de voirie, des vestiges de la « Tour perdue » ont été découverts à l’angle de la place d’Armes. Autrefois isolée au milieu du Clos aux Galées, port et arsenal royal, elle est également connue comme « Chatelet ». Elle était le cœur de la défense de la partie portuaire de la ville et avait également la fonction d’amer et de vigie. Jacques Vaillant, maître des œuvres de maçonnerie, l’aurait construite pour le compte des Anglais entre 1425 et 1429.
C’est à faible profondeur que sont apparues des maçonneries correspondant environ à un huitième de la surface de la tour. Un court tronçon de parement courbe permet de restituer un diamètre entre 18,00 et 19,00 m. La masse du blocage observée confirme une épaisseur du mur de la tour de 5,50 m. Les assises du parement sont réalisées en pierre de Caen et présentent un très léger fruit1. Au-delà du parement courbe, un massif rectangulaire, saillant de 1,10 m et large de 4,57 m, pourrait être un dispositif reliant la « Tour perdue » à la porte aux Cerfs (DUVERNOIS (B) et FOLLAIN (E) La porte de Rouen : un témoignage du passé médiéval d’Harfleur , Patrimoine Normand n° 91, octobre 2014, p. 80-85). La salle basse de 5,90 m de diamètre, qui se situait à ras du plan d’eau à marée haute, n’a pu être reconnue. Cependant, une partie de son escalier à vis, quatre marches monolithes, a été dégagée. Un conduit vertical (0,51 m x 1,60 m) de latrines a par ailleurs été vidé sur une hauteur de 1,60 m. De section rectangulaire, il comporte vers l’intérieur de la tour une petite face en glacis caractérisée par une forte inclinaison.
Grâce à la miniature des Vigiles de Charles VII (photo de gauche) et au graffito de l’église (photo de droite), nous avons une idée relativement précise de l’architecture de la tour (© photo Bruno Duvernois).
Les vestiges ont été ré-enfouis pour les protéger sous le plateau piétonnier. Cette découverte enrichit nos connaissances du port militaire médiéval d’Harfleur et prend toute son importance lorsque l’on considère la rareté des ouvrages construits par les Anglais sur le sol français lors de la guerre de Cent Ans. Bien évidemment, les vestiges sont arasés et limités au premier niveau de l’ouvrage. Pourtant, il faut souligner que nous disposons de deux documents pour connaître l’architecture de la « Tour perdue ». Une miniature des Vigiles de Charles VII, de Martial de Paris, dit d’Auvergne (conservées à la BNF) et un graffito de l’église paroissiale, montrent le tocsin qui occupait le sommet de la tour et les fenêtres à croisées de son dernier étage.
1) Inclinaison d'un mur pour en épaissir la base afin de mieux en assurer la stabilité.
Article publié dans Patrimoine Normand n°94, par Érik Follain et Bruno Duvernois.
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