Pendant que les navires de l'Armada 2013 voguent en direction d'autres horizons, c'est la tête pleine de vieux gréements et les yeux encore piqués par les embruns que nous bouclons ce nouveau numéro de Patrimoine Normand. Notre belle province entretient avec la mer une relation complexe et fusionnelle, quelquefois pacifiée, souvent houleuse, toujours intime. Année après année, nous tentons de partager avec vous les multiples facettes de cette relation. Ce N° 86 ne fait pas exception à la règle et le souffle du grand large s'engouffre entre les lignes de plusieurs de nos articles. Partons d'abord dans les entrailles du port médiéval d'Harfleur, englouti par la tourmente de la guerre de Cent Ans. Année de l'Impressionnisme oblige, nous vous convions ensuite à la découverte des somptueuses villas de la côte d'Albâtre, construites dans la seconde moitié du XIX^e siècle, en pleine mode des bains de mer. Elles furent pour certains disciples de Claude Monet d'inépuisables sujets d'inspiration. Nous vous guiderons enfin dans la station balnéaire de Deauville, au cœur des Années Folles.

Ce trimestre, notre dossier nous éloigne des côtes de la Manche pour nous conduire à Bayeux. Toutes nos idées pour un séjour de 48 heures dans la perle du Bessin ! La Normandie, c'est aussi un terroir d'exception, avec ses gras pâturages et ses généreux vergers, semés de villages de caractères. Son authenticité a séduit des personnalités fameuses du monde des arts et des spectacles, à l'instar de Jean Gabin venu s'installer dans l'Orne au début des années 50. Jean Gabin paysan normand, voici un autre visage de ce monstre sacré du cinéma que nous vous invitons à explorer. Non loin de la Moncorgerie, son ancien domaine, s'élèvent les vestiges mélancoliques de l'abbaye de Saint-Évroult. Au XII^e siècle y priait un certain Orderic Vital, moine de son état et premier véritable historien de la Normandie. La qualité de son œuvre mérite que l'on ravive son souvenir et que l'on s'arrête sur sa vie...

Mais la Normandie ne se contente pas de se laisser lire ou contempler : elle se respire aussi, elle se goûte, elle se savoure. Nous dégusterons donc ensemble une part de tarte aux poires, puis nous irons humer à Cambremer le parfum du vieux calvados, ce sang de la terre normande.

Tel est le rôle de Patrimoine Normand tel que nous le concevons : une invitation au voyage, au partage, à la découverte. Le dépaysement est au coin de la rue, au coin de votre rue... ou au fil des pages de votre magazine. C'est ce que vous confirmera Florence Moncorgé-Gabin, avec qui j'ai le plaisir de cosigner l'éditorial. Bonne lecture.

Mais la Normandie ne se contente pas de se laisser lire ou contempler : elle se respire aussi, elle se goûte, elle se savoure. Nous dégusterons donc ensemble une part de tarte aux poires, puis nous irons humer à Cambremer le parfum du vieux calvados, ce sang de la terre normande.

Tel est le rôle de Patrimoine Normand tel que nous le concevons : une invitation au voyage, au partage, à la découverte. Le dépaysement est au coin de la rue, au coin de votre rue... ou au fil des pages de votre magazine. C'est ce que vous confirmera Florence Moncorgé-Gabin, avec qui j'ai le plaisir de cosigner l'éditorial.

Bonne lecture.

La rédaction.
 

Patrimoine Normand est le magazine indispensable à tous les Normands, de naissance ou d’adoption. Je connais Laurent Corbin, son rédacteur en chef, depuis plusieurs années. Nous avons donc bien volontiers accepté, mon frère Mathias et moi-même, de raconter dans ses colonnes l’histoire de « Gabin Paysan ». Notre père avait en effet choisi la Normandie pour s'y installer, espérant créer avec cette terre un lien aux racines profondes.

Pourquoi choisir l’Orne plutôt que le Calvados, réputé d'un climat plus clément et plus accueillant pour les horsains ? Jamais il ne nous l'a dit. Il nous faut simplement l'accepter comme une évidence, l'un de ces faits bruts qui ne s'expliquent pas. Il fut pourtant rejeté par le monde paysan de l'époque et abandonné par l’État français. Un paradoxe difficile à admettre pour cet homme de conviction, volontaire dans les Forces Française Libres durant la Seconde Guerre mondiale afin de défendre son pays et ses valeurs. En 1976, alors que la canicule s'abat sur la France et menace son troupeau, le couperet tombe : « Pas d’impôt sécheresse pour Gabin et ses vaches de cinéma », annonce le gouvernement. 300 bêtes a cornes et 12 employés à l’année, ça ne ressemble pourtant pas exactement a la ferme de Marie-Antoinette au Petit-Trianon...

Puni d’avoir été visionnaire dans une région agricole alors sinistrée ? « Je paye mes impôts comme tout le monde. Et même plus que tout le monde », disait t-il souvent. Cette histoire n’est pas sans rappeler une autre, plus récente, celle d’un grand acteur gaulois parti sous d'autres cieux... Jalousie, rancœur, revanche… La France semble parfois oublier de défendre certains de ses enfants, et quels enfants : des personnes de cœur et particulièrement loyales.

Florence Moncorgé-Gabin.