« Un seul être vous manque… »
C’est avec une immense peine que nous avons appris la disparition de notre collaborateur et ami Thierry Georges Leprévost, décédé très subitement. Journaliste de profession, il avait passé l’essentiel de sa carrière chez France 3 Normandie. Il avait aussi grandement participé au succès de notre magazine, y publiant dès le premier numéro un article intitulé Le cheval, vivant patrimoine de la Normandie. Pour notre opus paru ce printemps, quelque 120 numéros plus tard (!), il nous avait rédigé un texte superbe sur les derniers ducs de Normandie, clôturant ainsi la saga en quatorze épisodes préparée ensemble. Voici, en deux articles séparés par vingt-sept années, un résumé de ses passions : le cheval, le patrimoine, la Normandie et l’Histoire.
Au fil de l’aventure de Patrimoine Normand, Thierry aura écrit des centaines d’articles, partageant son immense érudition sur les sujets les plus divers, de l’œuvre de Jules Barbey d’Aurevilly à l’architecture romane, du jardin Retiré de Bagnoles-de-l’Orne au Haras national du Pin, de Guillaume le Conquérant à Marcel Proust. Marcel Proust, dont nous commémorerons le centenaire de la disparition en novembre prochain. Et c’était Thierry qui devait s’en charger…
Depuis quelque temps déjà, il nous avait prévenu de sa volonté de se retirer, après tant et tant d’années de bons et loyaux services, et ensemble nous étions convenus d’un départ en douceur. Il devait d’abord consacrer un article à l’immense Léopold Sédar Senghor. Ce texte, nous avions prévu de le publier dans le numéro que vous tenez entre les mains, et il venait juste de nous l’envoyer. Dans les délais comme toujours, parfait comme toujours. Thierry était un grand professionnel, un auteur talentueux, doué du sens de la formule et qui ne visait que la perfection. Il devait donc tirer sa révérence dans notre numéro d’automne, en évoquant le souvenir de Marcel Proust, pour « boucler la boucle »… Nous commencions à songer à la façon de le remercier pour tout le travail accompli, avec un numéro un peu spécial ; nous n’imaginions pas un instant devoir précocement lui rendre cet hommage posthume.
Nous voici désormais ses héritiers et nous allons poursuivre dans la voie qu’il nous a tracée. Cependant, comme l’écrivait Lamartine dans L’isolement :
« Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumières,
Vains objets dont pour moi le charme est envolé ?
Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères,
Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé. »
Le fin lettré qu’était Thierry aurait sans doute apprécié. Nous lui dédions l’ensemble de ce numéro et toutes nos pensées vont à sa famille.
Stéphane William Gondoin et la rédaction