Patrimoine normand

Le calvados - quintessence du terroir normand

Jeudi 31 Janvier 2008
Le calvados - quintessence du terroir normand

Le calvados - quintessence du terroir normand. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)


Extrait Patrimoine Normand n°43.
Par Alexandre Vernon.

 
 Fleurs de pommiers. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)
Fleurs de pommiers. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

Après la pomme, le cidre, il était indispensable de passer à la troisième étape le calvados

Comme le fruit se fond en jouissance, comme en délice il change son absence… disait Paul Valéry, comme la pomme se dilue en une boisson pétillante de bulles d’or, le cidre exhale d’enivrants parfums en une eau-de-vie typique du terroir de Normandie : le Calvados.

La distillation permet ce miracle de changer la simple pomme en un nectar des dieux. Un miracle qui de tout temps a subjugué les hommes. C’est au XIVe siècle, époque où le cidre supplante la cervoise comme boisson usuelle, que l’eau-de-vie de « Sydre » apparaît mentionnée pour la première fois en 1553 dans un document officiel avec l’autorisation de distiller accordée au sieur de Gouberville, gentilhomme agromone et gastronome normand de la Manche. Mais en réalité la connaissance de cet alcool est beaucoup plus ancienne, dès l’époque gauloise, alors que les pommiers sauvages abondaient en Normandie et en Bretagne.

Une sélection rigoureuse des pommes et un lavage au grand jet, devant les bacs à cidre. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

Une sélection rigoureuse des pommes et un lavage au grand jet, devant les bacs à cidre. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

Des appellations d’origine

Pourquoi le nom de Calvados a-t-il été donné à cet alcool normand ? Étymologiquement Calvados serait d’origine… es­­pagnole ! À la suite du naufrage en 1588 qu’aurait subi un vaisseau de l’« Invincible Armada », « El Savador », sur les récifs de la Côte de Nacre. D’où le nom de Calvados attribué au département normand par la Convention en 1789. Mais ce n’est qu’à partir du XIXe siècle que l’eau de vie de cidre produite dans la région prit le nom de son département. Et ce n’est qu’en 1942 que le Calvados obtint son appellation d’origine contrôlée. Plus prosaïquement, il s’agissait du temps de l’occupation d’éviter la réquisition par les Allemands du cuivre des alambics et de l’alcool, car seules les eaux-de-vie classées étaient exemptées de saisie. Aujourd’hui, il existe plusieurs classements AOC : suivant la région bien délimitée, suivant le procédé de fabrication, suivant l’agrément de l’Institut National des Appellations d’Origine. (INAO).

Tout d’abord, l’appellation « Calvados Pays d’Auge » qui date de 1942, la toute première, réservée à la zone géographique du pays d’Auge. Il la doit à la fois à son terroir et à la façon dont il est distillé (alambic à repasse) aux fins de posséder au maximum les qualités naturelles de tout ce qui fait la puissance et la finesse d’une eau-de-vie de grande classe : la subtilité du bouquet, la douceur du goût et sa longueur, cette persistance de la saveur qui demeure longtemps après la dégustation. Ensuite on reconnaît l’appellation « AOC Calvados » à l’ensemble de la fabrication de l’eau-de-vie de cidre originaire de la Basse-Normandie, plus quelques communes limitrophes de la Mayenne et de la Sarthe. En Haute-Normandie, le Calvados distillé en pays de Bray bénéficie également de cette appellation. On notera en plus l’appellation récente « AOC Calvados Domfrontais » qui possède une saveur très originale due à la présence dominante de poiriers dans cette région. Dans le reste du territoire normand, l’appellation AOC Calvados est réservée à quelques enclaves bien particulières. On peut citer par exemple les célèbres caves de l’abbaye de Thélème à Ivry-la-Bataille qui abritent les Calvados Morin de grande réputation. Ce sont des Calvados AOC, en provenance directe du département du Calvados, qui se bonifient durant des années dans des foudres en chêne de grande contenance, à l’abri dans ces galeries exceptionnelles creusées à même le roc. Car, en règle générale, le cidre distillé en dehors des aires consacrées ne peut être que de l’eau-de-vie de cidre.

Alambic à colonne. (© Patrimoine Normand.) Alambic double distillation. (© Patrimoine Normand.)
Alambic à colonne. (© Patrimoine Normand.) Alambic double distillation. (© Patrimoine Normand.)
Dans la nature, un alambic, comme un signal. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)
Dans la nature, un alambic, comme un signal. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

La méthode de distillation

La transformation du cidre en Calvados se fait par distillation, opération qui consiste à séparer l’alcool de l’eau à l’aide d’un alambic. Déjà connu des Égyptiens et aussi au XVIe siècle par les apothicaires qui fabriquaient ainsi un puissant médicament, d’où le nom d’eau-de-vie, l’alambic d’aujourd’hui a gardé le même principe de base : il s’agit de chauffer le cidre dans une chaudière en cuivre surmontée d’un chapeau qui reçoit les vapeurs de l’échauffement. Les vapeurs d’alcool, plus légères, poursuivent leur chemin dans le col de cygne pour terminer leur parcours dans le serpentin baignant dans un liquide réfrigérant où elles se condenseront. L’appareil obligatoire pour l’appellation d’origine contrôlée « Pays d’Auge » est celui à « repasse », dit Charentais, tel qu’il est utilisé pour la fabrication du cognac.

La distillation proprement dite s’effectue en deux chauffes. D’abord pour l’extraction des « brouillis » ou « petites eaux » titrant à 28° et 32° dont on éliminera les têtes et les queues, c’est-à-dire le début et la fin du produit distillé. On procède ensuite à une seconde distillation au cours de laquelle on recueille le cœur du Calvados qui ne doit pas excéder 72° d’alcool à la sortie de l’alambic. C’est une eau-de-vie forte, rude et incolore mais présentant déjà toutes les caractéristiques du véritable Calvados. Au château du Breuil par exemple, en plein cœur du pays d’Auge, la distillation du Calvados prend l’allure d’un véritable cérémonial. D’abord par la sélection des pommes. « Car, il ne faut pas oublier, nous a dit Didier Bedu, directeur de cette superbe distillerie, tout vient de la pomme. » « D’où le choix ri­goureux des variétés de fruits, en direct de nos vergers sur quelque 42 hectares plantés de 22 000 pommiers, essentiellement en basse tige. Cette production est complétée par les apports de fruits en provenance de vergers de fidèles agriculteurs de la région, de la région exclusivement. Soit au total plus de 2 000 tonnes de pommes par an. »
 

Le château du Breuil
 

Le château du Breuil

Le château du Breuil
 
Au Breuil-en-Auge, au détour d’une allée ombragée, on aperçoit un château aux allures on ne peut plus normandes avec ses tours en colombages, son portail d’entrée entre deux petites poternes autrefois précédé d’un pont-levis : le château du Breuil, classé monument historique. De larges douves sont invisibles que quelquefois la Touques, qui enserre de ses bras la propriété, inonde encore lors de fortes crues.
Ce château a été construit sous François Ier par le seigneur de Bouquetot. Ce furent les Montgommery qui succédèrent à Jean III de Bouquetot, en 1611. Durant cette période le château du Breuil abrita le jeune Tancrède de Rohan, fils présumé de Henri de Rohan, homme de guerre réputé sous Henri IV et sous Louis XIII. C’est là, dans cette demeure fortifiée à l’époque, qu’on le cache étant enfant et même qu’on le fait passer pour mort. Sa mère le retrouve en Hollande beaucoup plus tard et intente un procès pour faire reconnaître son fils comme un Rohan. Ce qui était fortement contesté. Tancrède de Rohan mourut en 1649 à l’âge de 19 ans à Paris et fut inhumé à Genève dans le tombeau de son père putatif. Le fief du Breuil appartenait à la fin du XVIIe siècle au descendant d’une famille bourgeoise de Lisieux : les Bence (1696-1734), puis jusqu’en 1789 aux Rioult, famille noble bien connue dans la région. Depuis 3 générations, le domaine est consacré à la fabrication du Calvados. Le premier, Philippe Bizouard, originaire de Pont-l’Évêque, a su donner dès le début de bonnes orientations de qualité et d’authenticité, jusqu’à la forme exclusive de la bouteille, cirée et ficelée à la main, qui a été dessinée par lui.

Du château original, il ne reste aujourd’hui de la splendeur passée que les deux pavillons carrés de chaque côté d’un bâtiment central de construction plus récente (XVIIe). Ces deux pavillons aux colombages encastrés de tuileaux étonnent par leur élégance et, pourrait-on ajouter, par leur légèreté. Et l’on distingue quelques sculptures en haut des massifs poteaux corniers. Ce vaste bâtiment entièrement recouvert de toits en tuiles roses, fait face à un majestueux parc de hautes futaies et d’eau, en plein cœur de la vallée de la Touques. Dans l’enceinte de la cour d’honneur, se dressent de l’autre côté les communs, ou ce qu’on appelle « l’orangerie » que deux siècles séparent du château d’origine. Sous son toit à la Mansart, soutenu par une ferme d’une grande hardiesse, dorment en paix, dans une température égale tout le long de l’année, de merveilleux Calvados dans des fûts soigneusement répertoriés. À l’extérieur « la brique rose chante dans ses chaînages de pierre » comme le décrit le Dr Bureau. À l’intérieur, dans le silence et le mystère, s’élabore une eau-de-vie princière, réceptacle de tout un courant, de toute une histoire d’une terre généreuse.



Château du Breuil
Les Jourdains,
14130
LE BREUIL-EN-AUGE
Tél. : 02 31 65 60 00
 

 

Les arômes subtils de la pomme

Ces pommes, il convient de les laver très soigneusement, puis de les brasser pour en extraire le jus, introduit directement dans des hautes cuves où il devra macérer six semaines avant d’atteindre le degré d’alcool requis pour la distillation. Ce qui donnera un cidre de qualité supérieure, étroitement surveillé à toutes les étapes de son élaboration et suivant une fermentation parfaitement naturelle, sans adjuvant d’aucune sorte. Vient ensuite le temps de la distillation. En pays d’Auge, c’est la distillation à double repasse, obligatoire, qui est pratiquée, et au château du Breuil celle-ci s’effectue sous haute surveillance dans une chaufferie à l’épure absolue, nette comme un laboratoire, où les cuivres bril­lent de tous leurs feux.

Dans certaines contrées, on utilise parfois l’alambic de premier jet ou alambic à colonnes. Ce que l’on voit souvent dans des fermes et chez les bouilleurs de cru ambulants. La colonne est en fait une succession de petits alambics montés en série. Trois éléments la composent : la chaudière, la colonne dite d’épuisement avec 15 ou 16 plateaux, la colonne de condensation composée de 8 plateaux. C’est le système à double colonne qui autorise le fonctionnement en continu. Les vapeurs d’alcool sont finalement concentrées dans la plus petite colonne qui fournit directement l’eau-de-vie à 72° maximum.

L’alambic à repasse du Château du Breuil. (Photo château du Breuil.)

L’alambic à repasse du Château du Breuil. (Photo château du Breuil.)

L’art du vieillissement

« Savez-vous, nous a dit encore Didier Bedu, qu’il faut 27 kg de pommes ou encore 20 litres de cidre à 5° pour obtenir 1 itre de ce Calvados incomparable que l’on déguste avec ravissement ? » Ah ! Ces arômes subtils de la pomme, mais aussi de noisette, de vanille, de miel, de cannelle… dans ce breuvage ardent, âpre et chantant ! Mais pour en arriver là, que d’attention, de soin, de contrôle, de technique aussi et surtout de flair affiné dans l’art des assemblages ! Du temps aussi, car il est vrai que le temps favorise la bonification de l’eau-de-vie, et plus les âges s’accumulent… Mais que seraient toutes ces années sans le savoir-faire du maître de chai, sans la réussite de ses assemblages qui, à ce stade, constituent un art véritable ? Un art difficile car changeant d’une année sur l’autre suivant les récoltes et la diversité des variétés de fruits.

Le maître de chai : l’artiste aux assemblages. (Photo château du Breuil.)

Le maître de chai : l’artiste aux assemblages. (Photo château du Breuil.)

L’entrepôt des eaux-de-vie. Les fûts sont alignés en ordre. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

L’entrepôt des eaux-de-vie. Les fûts sont alignés en ordre. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

L’osmose du temps, du bois et de l’alcool

Le Calvados vieillit exclusivement en fûts de chêne, et c’est aussi tout un art que ce vieillissement. Car de la subtile osmose entre le bois, l’air et l’alcool dépendra la finesse et le bouquet du Calvados. L’alcool au con­tact du bois s’imprègne des substances tanniques qui lui donneront sa couleur naturelle ainsi que du corps. Puis, par l’effet oxydant de l’air des chais le Calvados va acquérir sa finesse et sa plénitude. Son arôme va s’exalter, sa coloration s’accentuer passant du doré à un ambre de plus en plus profond. Un peu plus tard, ce Calvados sera transvasé dans des foudres plus anciens, parfois centenaires, où il peut demeurer 5, 10, 25 ans et plus… qui lui donneront alors toute sa puissance et son parfum, inimitable. De toute façon, le Calvados AOC ne peut être mis en vente qu’après un vieillissement minimum de deux ans, titrant alors 40° à 45°. Cette durée n’a pas de limite. Et l’on trouve des Calvados vieux (3 ans) et jusqu’aux hors d’âge à partir de 6 ans de conservation en fût. Car le temps de conservation en bouteille ne compte pas, le Calvados n’y vieillissant plus.

Le petit verre de « Calva ». (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

Le petit verre de « Calva ». (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

Le petit verre de « Calva »

La bouteille de Calvados doit être de préférence conservée debout, au sec, à l’abri des variations de température. Elle se débouche avec respect, étant donné son grand âge. Le Calvados, comme tout eau-de-vie noble, ne se boit pas. Le Calvados se déguste, généralement à la fin d’un repas, comme digestif, et parfois, suivant une tradition bien ancrée en Normandie, au milieu d’un bon repas, comme « trou normand ». Le connaisseur servira le Calvados dans un verre ballon aux bords légèrement refermés afin que tout son parfum s’y concentre. Ce qui se produit au maximum lorsqu’on chauffe doucement le verre entre les paumes de ses mains tout en faisant tourner lentement le liquide. On est loin alors du « calva », type tord-boyaux, que l’on buvait d’un trait après le café, à moins qu’il ne fut versé directement dedans. Ce petit verre, c’est la « goutte », servie bien souvent dans les bistrots à la campagne, où à la ferme avant de partir au travail.

Car de tout temps, on a attribué au Calvados des vertus magiques, non seulement curatives mais aussi tonifiantes. Dans les campagnes normandes où l’on faisait soi-même son calva, il était même d’un usage courant… Le Calvados, c’était le bon coup de fouet pour faire repartir « la machine », c’était aussi le remède miracle contre la fatigue, contre le rhume et bien sûr contre toutes les maladies. Au point qu’on en donnait aussi quelques gouttes au nouveau-né avant même qu’il n’ouvrît les yeux…Car de tout temps, on a attribué au Calvados des vertus magiques, non seulement curatives mais aussi tonifiantes. Dans les campagnes normandes où l’on faisait soi-même son calva, il était même d’un usage courant… Le Calvados, c’était le bon coup de fouet pour faire repartir « la machine », c’était aussi le remède miracle contre la fatigue, contre le rhume et bien sûr contre toutes les maladies. Au point qu’on en donnait aussi quelques gouttes au nouveau-né avant même qu’il n’ouvrît les yeux…

Un bouilleur de cru et sa drôle de « bouillotte ». (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

Un bouilleur de cru et sa drôle de « bouillotte ». (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

 

La « bouillotte » des bouilleurs de cru

Cette survivance de la fabrication du Calvados à la ferme, on la retrouve aujourd’hui, et tel que cela se pratiquait dans le passé, avec les bouilleurs de cru qui vont de village en village, de ferme en ferme, bouillir pour le particulier quelques litres de la précieuse eau-de-vie. Ce métier ambulant tend hélas progressivement à disparaître du fait de la régression inéluctable et progressive des bénéficiaires des privilèges accordés à certains propriétaires-récoltant. En effet, et depuis 1960, les agriculteurs qui distillaient à cette époque ont encore aujourd’hui le droit de récolter l’alcool de leur verger, par leur propre alambic ou par l’intermédiaire d’un bouilleur de cru, à hauteur de 1 000° d’alcool pur sans payer de taxes, soit évidemment 20 litres de Calvados à 50°. Mais ce privilège n’est pas transmissible et bien des récoltants ont disparu depuis. C’est pourquoi dans bien des fermes on a abandonné la production personnelle de Calvados. Ce qui n’empêche pas pourtant le possesseur d’un verger de faire venir le bouilleur de cru pour distiller, mais il devra alors acquitter une taxe à l’administration. Une administration très stricte sur les allées et venues de la « bouillotte » - c’est ainsi qu’on appelle familièrement l’engin à distiller -, et sur les quantités d’alcool récoltées à chaque endroit. Ce dont le bouilleur doit rendre compte avec exactitude.

Christian Paris de Trouville-Alliquerville en pays de Caux que nous avons rencontré dans la cour de la ferme de M. Benoist à St Maclou la Brière où il avait installé sa machine à distiller, ne se plaint pas trop des difficultés de son travail. « J’ai toujours beaucoup de demandes dans toute la région, nous dit-il. La récolte de pommes cette année a été relativement abondante et celui qui fait un bon cidre tient à recueillir le nec plus ultra de sa production, c’est-à-dire un bon Calvados. Et ceci, avec ou sans taxes. » Le principal pour cet artisan agricole ainsi qu’il se définit lui-même, c’est de sauvegarder les qualités des produits du terroir, et en particulier celles de cette eau-de-vie aux arômes puissants, inégalables. La qualité du cidre qu’il doit traiter est du reste son grand souci, et il ne mettra pas sa machine en chauffe sans avoir au préalable goûté de ce cidre pour déterminer s’il est apte ou non pour la distillation. L’eau-de-vie alors recueillie est directement versée dans des petits fûts de chêne, au bois très sec, où elle s’affinera au fil du temps pour devenir, grâce à une alchimie secrète entre l’alcool, le bois et l’air, le merveilleux Calvados.
 

Le Calvados, ce n’est plus le « calva »

Il fut un temps, en particulier au début du XXe siècle, où la distillation d’alcool de cidre provoqua en Normandie d’homériques histoires de fraude, de poursuites. Car il existait des laboratoires clandestins. Actuellement tout est sévèrement réglementé par l’Administration des Douanes, (hier par les Contributions Indirectes). Il est vrai aussi que les bouilleurs de cru ne sont plus guère nombreux, à peine du dizaine en Seine-Maritime alors que l’on en comptait plus de 80 après la guerre, et que les alambics de nos grands-pères commencent à se faire vieux. « Un signe de la désaffectation de nos campagnes » comme nous le confiait tristement un vieil agriculteur.

C’est que le Calvados d’au­jourd’hui n’est plus le calva, l’espèce d’alcool à brûler qui vous enflammait le palais et l’œsophage. Fini le temps où l’on distillait à la va vite des cidres trop jeunes. Le Calvados AOC, fier de son origine, qu’il soit du pays d’Auge, de la Manche, du pays de Bray, ou même de l’Eure, dont il exhale de chaque région toute la puissance et la délicatesse de son arôme, tient à sa renommée. Les efforts de qualité effectués par les distillateurs, grands ou petits, tous des hommes passionnés, ont abouti à la venue d’un alcool de très grande classe, apprécié par de nombreux amateurs, aussi bien en France qu’à l’étranger, car chez quelques grands distillateurs comme le « Château du Breuil », 55 % de la production est exportée.

Les régions AOC du calvados. (© Grand Ordre du Trou Normand.)

Les régions AOC du calvados. (© Grand Ordre du Trou Normand.)

 

L’abus d’alcool est dangereux. À consommer avec modération.
 


Retrouvez l'article intégral dans la version papier de PATRIMOINE NORMAND (n°43, août-septembre-octobre 2002).
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