Patrimoine normand

Château-Gaillard en péril ?

Jeudi 31 Janvier 2008
Château-Gaillard en péril ?

Château-Gaillard menacé ? (Photo Georges Bernage © Patrimoine Normand.)


Extrait Patrimoine Normand n°32.
Par Georges Bernage.

 

La « restauration » du château de Falaise avait soulevé une vague d’indignation, jusqu’à l’étranger. Nous avions évoqué le dossier dans le n° 13 de Patrimoine Normand. Alors que les solutions étaient simples – bois et pan de bois – l’architecte avait cru bon de se singulariser (Oh combien !…) en imposant le béton, l’acier et le téflon, dénaturant de manière grave un monument majeur.

Le même architecte s’est vu confier le dossier de château Gaillard. Après l’indignation générale, quelle opinion le Conservateur Régional – qui décide d’un tel projet – se fait-il de l’opinion du plus grand nombre ? Faudra-t-il regretter, après ce manque flagrant de consultation que la « clameur de Haro » (voir encadré) n’existe plus ? 

Qu’en est-il ? – Il y a un projet de mettre en valeur Château-Gaillard. Après les « péripéries du silo »1, les travaux ont enfin commencé sur le site avec l’édification d’un belvédère en béton, surmonté d’une table d’orientation de cinq mètres environ de large et entouré d’une structure en acier. Il impose maintenant sa masse dans la perspective du château. L’édification d’un belvédère du même type a lieu sur le côté sud. En prévision : installation d’une passerelle de métal pour l’accès au donjon, en remplacement d’une passerelle en bois qui avait tenu plusieurs dizaines d’années. Deux autres passerelles sont prévues dans l’ouvrage avancé. En projet aussi, des cheminement en ciment. Et la suite ?

Château-Gaillard (Photo Georges Bernage © Patrimoine Normand.)

Château-Gaillard (Photo Georges Bernage © Patrimoine Normand.)

Un bois bien traité peut durer plusieurs siècles, les nombreuses maisons normandes du XVe siècle sont là pour le prouver. Alors pourquoi, une fois encore, béton et acier ?

Les Amis des Sites Andelysiens vient de se créer pour protester contre cette situation. Son président, G. Camille, dit que « le site de Château-Gaillard est en train d’être massacré par le béton et les poutrelles ». Il ajoute : « Nous voulons donc savoir ce que contient le reste du programme et amener une réflexion supplémentaire, éviter qu’on ne continue ça. La transparence doit être de mise, la discussion aussi. Nous pensons d’ores et déjà au lancement d’une pétition. Château-Gaillard n’appartient pas aux seuls Andelysiens. On ne peut accepter sans rien dire de voir le site accueillir des passerelles style Roissy. Que dire également du belvédère en béton et en ferraille qui défigure le paysage ? »

La clameur de Haro
 
« Le Haro, ou clameur de Haro, qui est particulière à la Normandie, et dont l’usage y est fréquent, est une voye de droit ou clameur publique, pour faire comparoir à l’instant de la clameur de Haro la personne sur laquelle le haro est interjetté, devant un Juge sans aucune ordonnance, ni permission, ni mandement de Juge, ni Sentence ou Jugement, ni Arrêt, même sans le ministère de Sergent ou Huissier.
« Les Normands se servent de ce terme Haro qui se dit par corruption de Rollo, Rou ou Raoul, premier Duc de Normandie, auquel ils avaient coutume de se plaindre hautement quand on les voulait opprimer.
« La Clameur de Haro a lieu tant en matière civile que criminelle, et pour toutes choses où il y aurait péril imminent dans le retardement, et quand il s’agit du possessoire et provisoire, même en matière Beneficiale, ou concernant le bien de l’Eglise, bien entendu par rapport à la possession en laquelle on serait troublé.
« Dès que le Haro a été interjeté, le défendeur au haro doit cesser son entreprise et trouble et suivre sur le champ et à l’instant le demandeur en haro devant le Juge compétent du haro : car si le défendeur en haro voulait s’enfuir, le demandeur en haro pourrait l’arrêter et constituer prisonnier, et l’un et l’autre resteroient prisonniers jusqu’à ce que la clameur de Haro eut été jugée et terminée par le juge.
« La Clameur de Haro peut être formée, faite et introduite par toutes sortes de personnes, et sur toutes sortes de personnes de l’un et l’autre sexe, Laïques ou Ecclésiastiques, il n’y a que les Juges et Officiers de Justice sur lequel le haro ne peut être fait, en faisant les fonctions de leurs charges, si ce n’est qu’en cas d’entreprise sur la juridiction d’autrui, ou que dans le moment du haro on ne les trouvât abuser évidemment de leur pouvoir par voyes de fait et nouvelles entreprises. » (…)
Extrait de la Coutume de Normandie, édition de 1743.
Cette « Clameur de Haro » est l’un des traits les plus originaux de la coutume de Normandie, bien imprégnée de l’esprit scandinave par la défense des libertés et droits individuels, libertés, pourtant très « modernes », perdues lors du 4 août 1789. 
 
Adresse de l’association :
Les Amis des Sites Andelysiens,
Maison des Associations,
rue Monica Delarue,
27700 Les Andelys – Tél. : 02 32 54 61 28.

 


1) Un affreux silo des bords de Seine devait être transformé en musée. Le Ministère des Affaires Culturelles avait décidé sa destruction, ce qui a retardé le projet.
 




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