Le Vexin, berceau de la Normandie
Mois de septembre très probablement, an de grâce 911. Après des années de guerres incessantes, le chef viking Rollon reçoit du roi des Francs Charles le Simple les terres comprises entre « l’Epte et la mer ». En quelques mots passés à la postérité, le chanoine Dudon de Saint-Quentin signe, vers l’an mille, l’acte de naissance de notre province. Cette rencontre fondatrice, Dudon la place « au lieu qui s’appelle Saint-Clair », sur ladite rivière Epte. Saint-Clair-sur-Epte entre dans l’Histoire… et dans la légende !
Voici donc notre modeste affluent de la Seine, dont nul jusqu’ici ne se souciait, soudainement promu au rang de frontière sensible : frontière entre un domaine royal réduit à une peau de chagrin et une Normandie ducale toujours plus puissante, ne cessant d’étendre son influence au cours des XIe et XIIe siècles. De part et d’autre de la vallée de l’Epte s’élèvent maintenant des forteresses monumentales, du haut desquelles les hommes d’armes des camps rivaux s’observent en chiens de faïence. À Trie et Chaumont-en-Vexin côté français, riposte Gisors côté normand ; à La Roche-Guyon répliquent Gasny et Baudemont… Comme un rideau de fer s’abattra au coeur de l’Europe des siècles plus tard, c’est ici un rideau de pierre qui tombe sur le Vexin et qui le coupe en deux.
La fraction normande du Vexin, avec ses terroirs, ses espaces naturels et son patrimoine, retiendra principalement notre attention. Sans toutefois nous interdire d’enjamber l’Epte, histoire d’aller voir si l’herbe est plus verte sur l’autre rive. Nous passerons ainsi au pied des forteresses de Gisors, de Châteauneuf-sur- Epte, de Château-Gaillard ou de La Roche-Guyon ; nous nous promènerons sous les couverts de la forêt de Lyons, à la recherche des fantômes de l’abbaye de Mortemer ; nous traverserons le plateau du Vexin pour partir à la découverte de la collégiale d’Écouis ; nous irons même frapper à une porte de Giverny, derrière laquelle se cache une demeure au jardin extraordinaire, chez un certain M. Claude Monet.
Parce que nous avons besoin d’air pur et de nature, nous mettrons le cap sur l’île Tatihou, les jardins de Rémalard ou les falaises de Paluel. Parce que nous avons besoin de souffle épique, nous grimperons sur le pont du navire de Jean-François Doublet, corsaire de Honfleur, et nous chevaucherons aux côtés de Mathilde l’Emperesse, digne héritière du tempérament de Guillaume le Conquérant. Voyages dans le passé, voyages à travers les richesses de notre région, afin d’échapper l’espace de quelques heures aux rigueurs du temps.
Bonne lecture
Stéphane William Gondoin et la rédaction